LOS ANGELES – Tinder et les autres réseaux sociaux de drague comme Grindr pour la communauté homosexuelle augmenteraient le nombre de MST comme la gonorrhée, le VIH/sida ou la syphilis. C’est en tout cas l’avis de la fondation californienne AIDS Healthcare Foundation (AHF) qui réalise actuellement une grande campagne de publicité par affiche dans l’agglomération de Los Angeles comme le montre cette photo prise par Creaparma dans le quartier d’Hollywood. L’objectif de cette campagne est d’inciter la population à se faire dépister contre les différentes MST.
Tinder
Tinder est une application très simple d’utilisation qui permet facilement de rencontrer de nouvelles personnes. Les profils sur Tinder sont extraits de Facebook. Selon le site Wikipedia, Tinder fait défiler des profils d’utilisateurs sur plusieurs critères, dont le sexe et la position géographique. L’utilisateur doit indiquer s’il les apprécie (« swipe right ») ou non (« swipe left »). Lorsque l’attraction est réciproque, les deux utilisateurs sont mis en relation et peuvent échanger des messages.
Campagne actuelle
La campagne actuelle à Los Angeles de l’AHF repose sur le slogan suivant : « Tinder, Chlamydia, Grindr, Syphilis. ». L’AHF ne semble pas jouer un rôle moral, comme par exemple en lien avec une institution religieuse, mais met en garde contre l’augmentation du risque de MST avec l’utilisation de ces réseaux sociaux et conseille aux personnes utilisant ces sites de se protéger et de se faire dépister contre les MST en effectuant par exemple le test du VIH.
Etudes scientifiques
Selon plusieurs études réalisées dans le monde, des sites comme Tinder augmentent le nombre de partenaires sexuels dans la société en rendant la drague (trop) facile, ce qui favorise la transmission des MST.
Une étude de 2012 réalisée en Nouvelle Zélande a montré que Grindr – une application de drague pour homosexuels (gay) – était associée à plus de la moitié des cas de syphilis en Nouvelle Zélande, selon le Christchurch Sexual Health Clinic.
Une autre étude publiée par le Rhode Island Departement of Health aux Etats-Unis affirme que le nombre de cas de MST dans cet état (Rhode Island) a augmenté entre 2013 et 2014. Selon cette institution, l’augmentation du nombre cas proviendrait d’un comportement à haut risque pour arranger des rencontres sexuelles anonymes et sans engagement, le fait d’avoir des relations sexuelles sans préservatif, avoir de nombreux partenaires sexuels ou encore avoir des relations sous l’influence des drogues et de l’alcool.
La jeune génération, addict au sexe sans engagement
Dans un long article de Vanity Fair (lire ici l’article en anglais), la journaliste Nancy Jo Sales explique comment une partie de la la jeune génération actuelle new-yorkaise, notamment les jeunes « loups » de la finance de Wall Street, utilisent Tinder de façon presque compulsive. La frontière avec la prostitution ne semble pas toujours très claire vu que la journaliste explique que certaines femmes, étudiantes notamment, profiteraient de rapports sexuels pour dîner gratuitement avec ces jeunes banquiers qui les invitent au restaurant en échange d’un payement en nature. Dans cet article, un banquier affirme que chaque semaine il a des rapports sexuels avec plusieurs femmes différentes rencontrées grâce à Tinder et autres réseaux de ce type. Selon lui, la drague est devenue beaucoup trop facile avec ces sites et applications comme Tinder.
Au niveau sociologique, Tinder et ses concurrents, semblent augmenter les cas de divorce et diminuer le nombre de mariage, car les hommes n’ont plus besoin de s’engager pour avoir des relations sexuelles. C’est en tout cas l’opinion de David Buss, un professeur de psychologie de l’Université du Texas à Austin, interrogé par le Los Angeles Times.
Réaction de Tinder
Tinder, basé également à Los Angeles mais dont la maison mère IAC est à New York, n’a pas trop apprécié cette publicité négative associée à sa marque. En septembre 2015, Tinder a envoyé une lettre à l’AHF pour demander le retrait de cette publicité, mais pour le moment sans succès. Rappelons qu’aux Etats-Unis, à la différence de l’Europe, des publicités négatives sont relativement courantes. Pour information, IAC est un grand groupe de média qui possède notamment le célèbre site de rencontres Meetic.
MST en suisse
En Suisse, l’Office Fédéral de la santé publique (OFSP) publie le nombre de cas de MST enregistrés dans le pays. On constate par exemple que le nombre de cas chlamydia (chlamydiose) s’est élevé à 10’003 pendant ces 52 dernières semaines, ce chiffre était de 9’620 à la même époque en 2014 et 8’581 en 2013. On constate une augmentation significative du nombre de cas en 2 ans, difficile toutefois de savoir si Tinder et ses sites concurrents en sont la cause. Les cas de gonorrhées ont aussi augmenté en 2 ans, de 1’882 pendant les 52 dernières semaines de 2015 contre 1729 en 2013. Par contre, les cas de syphilis et de VIH/Sida ont légèrement diminué. Pour y voir plus clair, une étude poussée devrait être réalisée en Suisse pour trouver la cause de l’augmentation des cas de chlamydia et de gonorrhée.
Le 1er décembre 2015 – Mise à jour le 10 juillet 2016. Par Xavier Gruffat (pharmacien). Envoyé spécial à Los Angeles. Sources : CNN.com, Los Angeles Times, Vanity Fair (version USA), OFSP, Wikipedia.org (version française et anglaise)