BERKELEY (CA) – Plus on vieillit et plus nos nuits deviennent problématiques avec notamment des réveils pour aller aux toilettes. La sensibilité au bruit augmente et les conséquences sont souvent une diminution du sommeil profond réparateur. Une récente revue d’études réalisée par la prestigieuse Université de Californie à Berkeley (UC Berkeley) a montré qu’un sommeil reposant et réparateur sans prendre de somnifères permet de lutter contre différentes maladies mentales et physiques. Selon les chercheurs californiens, un manque de sommeil réparateur chez les personnes âgées augmente le risque de perte de mémoire et de souffrir de nombreuses autres maladies. Le sommeil pourrait agir comme une véritable fontaine de Jouvence. Cette étude a été publiée le 5 avril 2017 dans la revue spécialisée Neuron.
Un mauvais sommeil tue
« Presque toutes les maladies qui nous tuent à la fin de notre vie ont un lien causal avec le manque de sommeil », explique le Prof. Matthew Walker de l’UC Berkeley qui a participé à ce travail dans un communiqué. Ce professeur de psychologie et neuroscience précise : « Nous avons fait un bon travail pour augmenter l’espérance de vie, mais un mauvais travail pour augmenter la durée de vie en bonne santé. Nous voyons désormais que le sommeil, et notamment augmenter sa qualité, est un nouveau chemin pour résoudre ce problème. »
Contrairement aux signes visibles de l’âge comme l’apparition des rides ou cheveux blancs qui sont plus des problèmes cosmétiques, la détérioration du sommeil avec l’âge est associée à des maladies graves comme la maladie d’Alzheimer, l’infarctus du myocarde, l’obésité, le diabète ou encore l’AVC.
Il faut savoir que les troubles du sommeil liés à l’âge, c’est-à-dire le passage d’un sommeil réparateur vers un sommeil plus problématique peuvent déjà débuter à la trentaine menant à des troubles cognitifs et des maladies physiques à un âge moyen.
Critique des somnifères
Les somnifères, qui garantissent des milliards de dollars de chiffre d’affaires chaque année à l’industrie pharmaceutique, sont la plupart du temps de mauvais substituts à un sommeil naturel de qualité permettant au cerveau de bien fonctionner à court et long terme. Le Prof. Walker met en garde : « Ne croyez pas que les somnifères provoquent un vrai sommeil, ce n’est pas le cas. » On sait aussi les somnifères diminuent le sommeil paradoxal.
Etude en détail
Le Prof. Walker et son équipe ont passé au crible de nombreuses études montrant notamment qu’avec l’âge le cerveau a de la peine à générer des ondes cérébrales lentes (sommeil profond et très profond, voir infographie ci-dessus) aboutissant à un sommeil réparateur, ainsi que les substances neurochimiques qui nous aident à passer de façon stable du sommeil à l’éveil.
« Les parties du cerveau qui se détériorent en premier sont les mêmes régions qui nous donnent un sommeil profond, » explique l’auteur leader de l’étude, le Dr Mander de UC Berkeley.
Transfert vers la mémoire à long terme
Le vieillissement provoque typiquement une diminution du sommeil à ondes lentes ou sommeil profond (non REM). Ce sommeil à ondes lentes aide notamment à transférer la mémoire et l’information de l’hippocampe, région du cerveau responsable du stockage d’informations à court terme, vers le cortex préfrontal qui consolide l’information, c’est-à-dire la zone de stockage d’informations à long terme.
« Malheureusement, le sommeil profond diminue lorsqu’on vieillit, et on découvre maintenant que ces troubles du sommeil sont associés à une perte de mémoire à la fin de la vie, » explique le Prof. Walker.
Pas tous égaux
Selon le Dr Mander : “Bien sûr, pas tout le monde est vulnérable aux changements du sommeil avec l’âge, comme certains vieillissent mieux que d’autres, certains dorment mieux que d’autres à un âge avancé, et c’est une autre ligne de recherche qu’on aimerait explorer. »
Absence de traitements efficaces
Pour le moment, des interventions non médicamenteuses sont testées pour augmenter la qualité du sommeil comme une stimulation électrique pour amplifier les ondes du cerveau pendant le sommeil ou des sons acoustiques qui agissent comme un métronome pour ralentir le rythme dans le cerveau. Néanmoins, la promotion d’alternatives à la prescription de médicaments est sans aucun doute difficile.
« L’American College of Physicians (Collège Américain de Médecins) a reconnu que les somnifères ne devraient pas être utilisés en première intention lors de troubles du sommeil. Les somnifères calment le cerveau, au lieu d’aider à un sommeil naturel. Nous devons trouver de meilleurs traitements pour restaurer un sommeil sain chez les personnes âgées, et c’est maintenant l’une de nos missions de recherche dédiées, » affirme le Prof. Walker.
Qualité et pas seulement quantité
Les chercheurs américains essayent de défendre aussi le concept de qualité du sommeil. Pendant longtemps, on a considéré comme seul facteur important le nombre d’heures de sommeil et négligé la qualité du sommeil. « En fait, on a besoin autant de quantité que de qualité », conclut le Prof. Walker dans son communiqué.
Combien d’heures faut-il dormir par nuit ?
Concernant justement la quantité du sommeil, le Dr Jon LaPook qui est médecin consultant pour la plus grande chaîne de télévision des Etats-Unis en audience, la CBS, estime qu’il faudrait dormir entre 7 et 8 heures par nuit après l’âge de 40 ans en particulier pour prévenir la maladie d’Alzheimer et les autres démences. Relevons que le Dr LaPook n’a pas participé à l’étude de l’UC Berkeley.
Le 7 avril 2017. Par Xavier Gruffat (Pharmacien). Sources : communiqué de presse de l’étude, CBSNews. Crédits photos : Fotolia.com, Wikipedia.org
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