PARIS – La revue scientifique Prescrire, connue pour son indépendance envers la puissante industrie pharmaceutique, a publié début 2017 sa liste de médicaments vendus ou proposés en pharmacie à éviter parce que la balance bénéfices-risques s’avère défavorable. Il s’agit en fait d’une actualisation d’une liste créée il y a plusieurs années.
Selon Prescrire, les médicaments qu’on trouve dans cette liste (lien en bas de l’article) sont à écarter des soins et à remplacer par de meilleures options. Sur les 91 médicaments que comptent cette liste, 82 sont commercialisés en France et 9 dans un pays ou plusieurs pays de l’Union Européenne mais pas en France. Selon nos informations, la plupart des médicaments de cette liste sont aussi vendus en Suisse, Belgique et Canada.
L’idée de cette liste est d’utiliser des traitements alternatifs y compris des remèdes naturels. Le document de Prescrire ne le précise pas mais par exemple en cas de mal de gorge, une simple préparation d’eau salée en gargarisme peut s’avérer très efficace. L’eau salée peut aussi être instillée lors de rhume ou de sinusite avec une remarquable efficacité également.
Dans cet article, nous reprenons surtout les médicaments courants vendus notamment en vente libre (par ex. en pharmacie). La liste de Prescrire comprend aussi des médicaments sur ordonnance indiqués notamment en cas de cancer.
Médicaments contre la toux et les maux de gorge
Dans la liste actualisée de 2017, deux mucolytiques utilisés souvent contre la toux et les maux de gorge l’ambroxol (Muxol® et génériques) et la bromhexine (Bisolvon®) ont été notamment inclus. Selon les scientifiques travaillant pour la revue Prescrire, ces médicaments s’avèrent peu efficaces et présentent un risque rare mais potentiellement grave d’effets secondaires menant à des réactions d’hypersensibilité et de troubles cutanés graves, voire mortels.
Rhume
Un médicament assez souvent utilisé contre le rhume, la phényléphrine, a été nouvellement placé sur cette liste. Ils viennent compléter d’autres molécules appelées sympathomimétiques vasoconstricteurs utilisés aussi contre le rhume comme l’éphédrine, la naphazoline, l’oxymétazoline, la pseudoéphédrine et le tuaminoheptane. Selon Prescrire ces médicaments ou molécules exposent à des troubles cardiovasculaires graves voire mortels.
Allergie
La méquitazine, un antihistaminique H1 à effet sédatif appartient aux médicaments à éviter lors d’allergie.
Douleurs et maux de dos, AINS
Un médicament souvent très utilisé, le diclofénac par voie orale est déconseillé par les scientifiques français. Selon eux cette molécule ainsi que l’acéclofénac mènent notamment à des effets secondaires de type cardiovasculaire, davantage que d’autres anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS). D’autres AINS sont mentionnés dans la liste comme le célécoxib, l’étoricoxib ou le parécoxib.
En cas de douleur il est préférable d’utiliser du paracétamol et en cas de douleurs accompagnées d’inflammations de l’ibuprofène ou de naproxène aux doses les plus basses pour être efficaces. Le kétoprofène en gel ainsi que le piroxicam par voie générale sont aussi déconseillés et appartiennent à la liste.
Médicaments « naturels »
De façon plus surprenante, on trouve dans cette liste « noire » une molécule provenant du poivre de Cayenne, la capsaïcine. Selon les scientifiques français, cette molécule indiquée contre les douleurs neuropathiques ne serait pas plus efficace qu’un placebo et provoquerait des effets secondaires comme des douleurs importantes ou brûlures.
La quinine, une autre molécule d’origine naturelle, indiquée en cas de crampes est déconseillée à cause d’effets secondaire graves, parfois mortels. On peut citer notamment des réactions anaphylactiques et des troubles hématologiques.
Nausées et vomissements
Un médicament très utilisé, la dompéridone (Motilium® et génériques), est déconseillé dans la même logique que la plupart des traitements de la liste à cause d’une faible efficacité et l’apparition d’effets secondaires potentiellement graves (troubles du rythme ventriculaire pouvant mener à la mort subite). Le dropéridol (Droleptan®) est aussi cité avec le même risque que la dompéridone.
La dompéridone est indiquée aussi lors de reflux gastro-oesophagien mais les scientifiques de Prescrire estiment que pour cette indication, il faut privilégier d’autres molécules comme l’oméprazole.
Dépression
Plusieurs médicaments indiqués pour soigner la dépression appartiennent à cette liste, citons par exemple la duloxétine, la venlafaxine ou le citalopram avec des risques d’effets secondaires menant à des troubles cardiovasculaires. Pour les scientifiques français, il existe d’autres antidépresseurs tout autant efficaces présentant moins d’effets secondaires.
Alzheimer
Citons encore pour terminer que les médicaments contre la maladie d’Alzheimer sont à éviter car ils ont, selon la formulation de la revue Prescrire, une efficacité minime et transitoire alors qu’ils présentent des effets secondaires et un risque d’interactions importantes. En 2017, la plupart des scientifiques sérieux à travers le monde reconnaissent que les médicaments contre la maladie d’Alzheimer ne sont pas satisfaisants (lire notre dossier complet sur la maladie d’Alzheimer).
Le 29 janvier 2017 – Mise à jour de l’orthographe et des liens le 6 octobre 2021. Source : Prescrire. Article écrit par Xavier Gruffat (Pharmacien). Crédits photos : Fotolia.com
SI JE ME FAIS L’AVOCAT DU DIABLE… – Ce genre d’études peut être louable mais présente aussi quelques risques pour la société en général. Il est évident que tout médicament peut théoriquement mener à des effets secondaires et parfois à la mort. Mais n’oublions pas que la voiture aussi tue, plus d’un million de personnes par année dans le monde. Est-ce qu’un jour on aura des recommandations pour éviter d’utiliser la voiture et privilégier l’avion ou le train ? Sans compter que le vélo est encore plus dangereux que la voiture, il est statistiquement probablement plus risqué de circuler à vélo à Paris tous les jours que prendre un médicament contre la toux avec un risque infime d’effet secondaire mortel. Bien sûr certains diront qu’il s’agit de la mauvaise foi et d’une comparaison douteuse. Néanmoins la question est de savoir si un médicament qui peut mener à la mort par exemple dans un cas sur 1 million doit véritablement mériter d’angoisser toute une population. Peut-être oui, peut-être non. En tout cas cela ne remet pas en cause l’excellent travail avec plein de professionnalisme de la revue Prescrire. Qu’en pensez-vous ?
vous avez tout à fait raison Mr xavier