PARIS – L’autisme est une maladie neurologique qui atteint un nombre de plus en plus élevé d’enfants dans le monde. Si les chiffres sont alarmants, un diagnostic réalisé au plus tôt permet une prise en charge plus efficace. Malgré les nombreuses recherches réalisées en vue de mieux comprendre cette maladie, l’énigme reste presque entière, même si des résultats probants commencent à être publiés sur son origine. L’autisme porte aussi le nom de troubles du spectre autistique (TSA), de l’anglais autism spectrum disorder.
Qu’est-ce que l’autisme ?
L’autisme infantile est une maladie affectant le fonctionnement du cerveau et le système immunitaire, ce qui crée des troubles au niveau communicationnel, relationnel et surtout social chez l’enfant. Elle se manifeste généralement avant l’âge de 3 ans. Les troubles du comportement et la sensibilité émotionnelle sont causés par l’incapacité à reconnaître les codes sociaux et affectifs, ainsi que les expressions. Un enfant autiste présente le plus souvent un retard de développement mental, un trouble de la parole, ainsi qu’un comportement restreint et répétitif. Un changement dans les habitudes qu’il a adoptées ou une interaction sociale risquent de causer une perturbation qui peut s’exprimer par des crises d’angoisse et de colère, des troubles du sommeil et de l’alimentation.
Etats-Unis, 1 naissance sur 41
Aux États-Unis, 1 enfant sur 41 est désormais diagnostiqué autiste selon des données de 2018. Touchant 3 fois plus les garçons que les filles, cette maladie devient un véritable phénomène de santé publique.
Diagnostic
Si les chiffres démontrent une augmentation certaine du nombre de personnes souffrant d’autisme dans le monde, rien ne permet pour l’instant d’expliquer de façon précise la raison de cet accroissement. Il est possible que ce soit dû uniquement à l’avancée scientifique qui permet un diagnostic plus rapide, même si certains chercheurs comme le Dr Wei Bao de l’Université de l’Iowa qui a réalisé un travail sur l’autisme en 2018 estiment qu’un meilleur diagnostic ne suffit pas à expliquer tous les cas d’autisme.
Causes
De nombreuses hypothèses sont émises sur les causes probables de l’autisme. Il serait le résultat d’un trouble de développement lors de la maturation du cerveau, causé par des problèmes d’ordre biochimique, immunologique ou traumatique. Selon certaines études, la génétique y serait aussi pour quelque chose, avec 3 % – certaines sources parlent d’un taux encore plus élevé – de probabilité de naissance d’un enfant autiste dans une famille déjà concernée.
L’environnement figure également parmi les facteurs mis en cause. Certaines agressions précoces comme les métaux lourds ou les agents infectieux pourraient avoir un impact sur la cognition et contribuer à l’apparition de la maladie.
Encore au cœur des polémiques, il existe une autre théorie selon laquelle un recours précoce aux antibiotiques pendant la petite enfance serait susceptible de provoquer des maladies comme l’autisme ou en augmenter le risque d’apparition. Dans ce cas, la flore intestinale serait en cause. Une étude dirigée il y a quelques années par le Pr Beat Schwaller de l’Université de Fribourg (UNIFR) en Suisse soutient la thèse que certaines modifications génétiques à l’origine de l’autisme seraient dues au manque de parvalbumine, une protéine qui participe à la fixation du calcium.
Une nouvelle explication : les variantes génétiques
Une étude publiée le 12 février 2019 dans le journal eLife (DOI : 10.7554/eLife.40092) apporte de nouvelles connaissances sur les mutations génétiques associées à l’autisme. Les résultats suggèrent qu’une activité accrue des neurones déficients en gène CNTN5 ou EHMT2 pourrait causer des caractéristiques liées à l’autisme chez les humains. Une équipe de chercheurs du Hospital for Sick Children (SickKids), de l’Université de Toronto et de l’Université McMaster au Canada a développé une ressource de 53 lignées différentes de cellules souches pluripotentes induites (CSPi) dérivées de 25 personnes atteintes d’autisme, porteuses d’un large éventail de variantes génétiques rares, et de membres de leur famille non affectés. Suite à l’étude des propriétés synaptiques et électrophysiologiques de ces lignées CSPi, à l’aide d’un réseau multi-électrodes à grande échelle pour les enregistrements neuronaux et les enregistrements patch-clamp plus traditionnels, les résultats ont révélé de nombreuses associations intéressantes entre les variantes génétiques et les caractéristiques neuronales analysées. Selon le Dr Éric Deneault, la découverte la plus convaincante est une hyperactivité constante et spontanée du réseau dans les neurones déficients en gènes CNTN5 ou EHMT2, ce qui peut causer des caractéristiques autistiques chez les personnes. Cette découverte des réseaux hyperactifs correspond à la vision actuelle de l’autisme et ouvre la voie à une étude plus approfondie de leur rôle dans cette maladie. « La biobanque de neurones dérivés de CSPi et les données génomiques qui l’accompagnent sont accessibles à tous pour aider à accélérer la recherche dans ce domaine », déclare le Dr Stephen Scherer, coauteur principal du document et directeur du Centre for Applied Genomics at SickKids et du Centre McLaughlin de l’University of Toronto. “Nous espérons que cela accélérera le développement de nouvelles stratégies thérapeutiques potentielles pour les patients autistes”.
Un espoir de guérison ?
À l’heure actuelle (2019), espérer une réelle guérison de l’autisme n’est pas encore envisageable. Une prise en charge dès la petite enfance, alliant thérapie et éducation spécialisée, permet d’atténuer les symptômes et d’améliorer l’apprentissage pour que l’enfant puisse s’intégrer socialement, interagir avec le monde, et développer son potentiel dans des activités de la vie quotidienne. Étant donné que chaque cas est unique, chaque enfant a besoin de bénéficier d’une aide adaptée, qu’elle soit intensive ou simplement supervisée. La méthode dite Lovaas fait partie des thérapies qui visent la structuration et le renforcement de nouveaux apprentissages, afin de limiter les comportements à risque, et permettre aux enfants autistes de devenir autonomes.
Prévention
Certaines études ont montré que l’utilisation prénatale de vitamines par les mères était associée à une diminution des troubles du spectre autistique (TSA). On peut citer une étude publiée le 27 février 2019 dans le journal scientifique Jama Psychiatry (DOI : 10.1001/jamapsychiatry.2018.3901). Cette étude portait sur 241 enfants qui ont été sélectionnés parce qu’un frère ou une sœur avait reçu un diagnostic de TSA. Les mères ont déclaré avoir utilisé des vitamines prénatales pendant leur grossesse. Alors que la plupart des mères ont déclaré avoir pris des vitamines prénatales pendant leur grossesse, seulement 87 (36 %) d’entre elles ont respecté les recommandations de prendre des vitamines prénatales au cours des six mois précédant la grossesse. Les chercheurs rapportent que les enfants dont les mères avaient pris des vitamines prénatales au cours du premier mois de grossesse semblaient moins susceptibles de recevoir un diagnostic de TSA que les enfants dont les mères n’avaient pas pris de vitamines prénatales pendant cette période. La proportion d’enfants atteints de TSA chez les mères qui ont pris des vitamines prénatales au cours du premier mois de grossesse était de 14,1 % (18 enfants) comparativement à 32,7 % (37 enfants) chez celles dont la mère n’a pas pris de vitamines prénatales pendant cette période. L’une des limites de cette étude est qu’il s’agissait d’une étude d’observation, ce qui signifie qu’il peut y avoir eu des différences entre les deux groupes qui n’ont pas été prises en compte dans l’analyse, même si les chercheurs ont tenu compte de nombreux facteurs. La taille relativement petite de l’échantillon de l’étude constitue une autre limite. Cette étude est importante parce qu’il y a eu des études contradictoires sur la question de savoir si l’utilisation de vitamines prénatales par la mère est associée à un risque moindre de TSA. D’autres recherches sont nécessaires pour confirmer les associations observées dans cette étude.
Article mis à jour le 27 février 2019. Par la rédaction de Creapharma.ch (supervision scientifique : Xavier Gruffat, pharmacien). Sources & Références : Fox News, ATS (agence de presse suisse), CBSNews, journal eLife (DOI : 10.7554/eLife.40092), Jama Psychiatry (DOI : 10.1001/jamapsychiatry.2018.3901).