Remèdes naturels, un atout santé ! Interview avec Christine Cieur

Remèdes naturels, un atout santé ! Interview avec Christine Cieur

Parallèlement à l’essor des technologies scientifiques et à l’ultraspécialisation des médicaments, le besoin vital de renouer avec la nature grandit de toute part. Et contrairement à ce que l’on croit souvent, ces deux voies, loin d’être incompatibles, sont en réalité complémentaires. À travers son livre « Au comptoir de l’herboriste », la Dre Christine Cieur, une spécialiste de la phyto-aromathérapie, invite ses lecteurs à découvrir un bouquet des meilleures recettes à réaliser soi-même, une source d’inspiration et d’idées pour s’engager activement au maintien de sa propre santé. Ce livre est illustré par de très belles photos qui donnent envie de préparer tous ces remèdes naturels. Pharmacienne de formation, Christine Cieur a mis en place il y a quelques années « L’Atelier des Simples », un espace dédié à la santé naturelle afin de faire connaître des associations de plantes, aux résultats éprouvés, qui lui ont semblé dignes d’être partagées. Creapharma.ch a pu lui poser quelques questions par e-mail à l’occasion de la sortie de son livre le 13 septembre 2022.

Creapharma.ch – Tout d’abord bravo pour votre livre, d’où vient votre passion pour la phytothérapie en général et les remèdes naturels ?
Dre Christine Cieur  – Elle me vient de mes études qui, à l’époque (dans les années 1970), étaient encore très centrées sur la “matière médicale » c’est-à-dire les sources thérapeutiques venant des plantes, associée à une base solide de botanique. J’ai également eu la chance de vivre mon enfance à la campagne propice aux soins naturels avec à la clé le besoin de venir m’y ressourcer régulièrement.

Vous avez structuré le livre en 3 parties, les remèdes naturels en soins d’urgence, les maux de l’hiver et infections puis les remèdes contre le stress. Pourquoi un tel choix ?
Ce choix répondait au cahier des charges de l’éditeur en rapport avec la collection dans lequel s’intègre ce livre qui, de fait, ne devait pas contenir plus de 3 grandes parties. Il a donc fallu trouver des titres de chapitre susceptibles de répondre aux sujets les plus courants. Cependant, l’important est que bon nombre de recettes puissent répondre à un maximum de troubles du quotidien.

Plusieurs remèdes de votre livre sont à base d’hydrolat, de quoi s’agit-il ? Est-ce difficile à préparer soi-même ?
Les hydrolats sont obtenus par entraînement à la vapeur d’eau de parties de plantes aromatiques (thym, eucalyptus, menthe poivrée…) ou non (bleuet, hamamélis…). Autrement dit, toutes les plantes distillées par entraînement à la vapeur d’eau peuvent fournir un hydrolat, mais seules les plantes aromatiques produiront à la fois de l’hydrolat (fraction aqueuse) et de l’huile essentielle (fraction huileuse). Au passage, précisons que l’appellation « eau florale » est réservée aux hydrolats issus de fleurs (par exemple : l’eau florale de fleur d’oranger). Pour ma part, je considère que fabriquer soi-même un hydrolat n’est pas facile si l’on ne dispose pas d’un appareil spécifique, à savoir un alambic (cependant, pour les plantes non aromatiques, des méthodes artisanales avec une cocotte et un panier vapeur sont décrites sur internet…). Insistons aussi sur le fait que les hydrolats sont de plus en plus reconnus (et heureusement !) comme une forme galénique à part entière. D’ailleurs, plusieurs études ont montré que la composition chimique aromatique d’un hydrolat donné est différente de l’huile essentielle issue de la même plante. Il est donc important de comprendre que l’hydrolat n’est pas la forme moins concentrée de l’huile essentielle correspondante, même si, bien sûr, les propriétés sont similaires.

Parlez-nous des cataplasmes, vous citez plusieurs recettes. Sans entrer dans les détails, quand les utilise-t-on en médecine ?
En fait, l’usage des cataplasmes était très fréquent dans les temps plus anciens. Le modernisme et le besoin d’aller vite a relégué cette méthode de soin dans les placards… Le cataplasme est très facile à réaliser soi-même puisqu’il suffit de piler une plante (de préférence fraîche) afin d’en obtenir une purée que l’on applique pure ou mélangée à un peu d’huile (ou de glycérine) sur la peau. Ainsi, le passage des principes actifs à travers la peau permettra une action locale rapide. Les cataplasmes appliqués chauds ou froids (selon les cas) sont principalement utilisés contre les douleurs diverses et variées : douleurs articulaires ou musculaires, douleurs de ventre, douleurs de règles, maux de tête, etc.

Parmi les soins d’urgence, quel est le remède que vous préférez ou qui vous semble particulièrement efficace ?
Bien difficile de répondre à cette question car ils sont tous utiles ! Je pense cependant que le cataplasme d’argile verte est un incontournable tant il peut résoudre nombre de maux ! De surcroît, il est simple et très rapide à faire. L’argile verte est donc un remède naturel a toujours avoir chez soi…ou à emporter avec soi !

Qu’est-ce qu’un élixir, vous avez aussi plusieurs recettes dans votre livre ?
Il s’agit ici d’élixir floraux fabriqués à partir d’une infusion (avec exposition solaire) de fleurs sauvages cueillies au pic de leur floraison. C’est-à-dire des préparations destinées à rééquilibrer nos états émotionnels lorsque ceux-ci impactent notre bien-être. C’est un médecin anglais, le docteur Edward Bach (1886-1936) qui est à l’origine de ce que l’on nomme maintenant la florithérapie. Scientifique chevronné (bactériologiste et homéopathe) et précurseur (il avait déjà mis en avant le rôle de l’intestin sur la santé), le docteur Bach considérait que la maladie n’était que le stade ultime d’un désordre plus profond venant de nos déséquilibres émotionnels. Il a ainsi créé 38 élixirs ou “Fleurs de Bach », chacune agissant sur un aspect émotionnel particulier (peur, doute, colère, etc.).

Vous parlez aussi du miel, on oublie parfois que c’est un remède naturel…
Vous avez raison ! Les vertus du miel sont reconnues depuis l’Antiquité où il était déjà utilisé pour accélérer la cicatrisation des blessures, de par ses propriétés naturellement cicatrisantes, antiseptiques et antibactériennes. Pour la petite histoire, il paraît que pendant les campagnes d’Alexandre le Grand, les pièces de viande étaient enveloppées d’une couche de miel épaisse afin de garantir une bonne conservation tout au long du voyage…
Plus près de nous, les propriétés médicinales du miel ont d’ailleurs été mises en avant par le professeur Descottes (1943-2008) au CHU de Limoges pour les soins des plaies postopératoires et les escarres ; son expérience clinique l’a conduit à définir un protocole de soin avec le miel de thym qui contribua au développement de l’apithérapie médicale.

Est-ce qu’il y a une différence entre une teinture et une teinture mère ?
Effectivement vous avez raison  ! Même si dans le langage courant nous faisons souvent l’amalgame des deux termes. Le mot « teinture » désigne normalement une dissolution extractive (macération) dans l’alcool d’une plante (ou partie de plante), la plupart du temps séchée de façon à obtenir, sauf exception, un rapport de 1/5 (soit 200 g de plante sèche pour 1 litre d’alcool). La teinture-mère (TM), quant à elle, lorsqu’elle est fabriquée dans les règles de l’art, provient généralement d’une plante fraîche (donc contenant de l’eau) et est préparée au 1/10, c’est-à-dire que 10 g de la préparation correspond à 1 g de plante sèche. D’autre part, dans les deux cas (teinture ou TM), le degré alcoolique est très précis. Il est bien évident que les préparations faites maison sont beaucoup plus approximatives. Cependant, malgré cela, elles restent efficaces !

Est-ce que préparer soi-même ses remèdes n’a pas aussi un côté thérapeutique ? Prendre le temps…
Oui, ce que vous soulignez est très important ! Faire soi-même participe au soin. Comme si le fait de s’engager dans la fabrication, de prendre le temps pour soi enclenchait au niveau du cerveau tout le processus de guérison…Je pense que les neurosciences pourraient nous en apprendre beaucoup sur le sujet.

Ce qui est intéressant dans votre livre est la diversité des formes galéniques, on trouve des tisanes, sirops, cataplasmes… Est-ce que c’est quelque chose qui vous tient à cœur d’avoir une vaste gamme de formes galéniques ? Autrement dit il n’y a pas que la plante qui compte mais aussi la forme galénique…
Depuis la nuit des temps l’homme s’est attelé à trouver les meilleures formes thérapeutiques possible afin que l’organisme puisse disposer au mieux des principes actifs des plantes. La diversité dont nous bénéficions aujourd’hui n’est donc pas due au hasard. En effet, les plantes ayant un cycle de vie déterminé, il a fallu trouver les moyens d’utiliser une plante quelle que soit la saison. Si je tousse en novembre, comment faire pour utiliser le coquelicot qui ne fleurit que l’été ? Toutes ces contraintes ont permis à l’homme de mettre à profit sa créativité et son intelligence pour expérimenter les différentes formes galéniques. Parallèlement il s’est rendu compte que chaque forme avait sa spécificité. Par exemples : les sirops sont davantage appréciés par les enfants qui n’aiment guère l’amertume de certaines plantes ; la prêle des champs (tiges stériles) manifeste préférentiellement son action reminéralisante lorsqu’elle est absorbée sous forme de poudre (ou encore de suspension intégrale de plante fraîche) tandis que sous forme de teinture-mère, c’est davantage son action diurétique et drainante qui est mise à profit. Pour conclure, nous pourrions dire que chaque plante et chaque forme galénique possède un réel atout pour notre santé !

Plus d’informations sur son livre (15 euros), achat possible ici ou en libraire.

Article publié le 13 septembre 2022. Interview réalisée en septembre 2022 par l’équipe de Creapharma.ch pour le site Creapharma.ch. Crédits photos : divulgation (auteur et éditeur).

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Informations sur la rédaction de cet article et la date de la dernière modification: 25.09.2023
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