Interview exclusive avec l’influenceur Tom le Jardinier : de la consommation locale à la culture d’aromatiques

« Le basilic est une star des herbes aromatiques et comme toutes les stars elle a des caprices. » Tom le Jardinier

LAUSANNETom le Jardinier nous raconte son histoire et nous livre quelques secrets de jardinage en cette fin de printemps, il nous explique aussi ce qu’est le « locavorisme ». Tom le Jardinier compte presque 15’000 fans Instagram (fin mai 2020) appelés ses jeunes pousses et a tout pour devenir le plus célèbre jardinier de Suisse romande et même au-delà, sa notoriété en France est croissante suite à un reportage diffusé il y a quelques semaines sur France 2 dans l’émission « Je t’aime, etc… ». Son authenticité semble être à l’origine de ce succès croissant comme on le verra dans cette interview. Selon lui, le jardinage est devenu dans beaucoup de pays une véritable prise de conscience et non pas une simple mode. A la fin il nous parle de la difficulté à cultiver du basilic et nous explique pourquoi le sureau apporte de la biodiversité à un jardin.

Creapharma.ch (Xavier Gruffat) – Raconte-nous un peu ton histoire, tu voulais devenir horticulteur et la vie en a décidé autrement, certains moments difficiles ?
Tom le Jardinier (Tom Monnat) – J’ai obtenu le diplôme d’horticulteur et je voulais créer mon entreprise de panier de légumes. Mais comme j’ai souffert d’un sarcome au niveau de la cheville, je n’arrive pas à travailler à temps plein dans les champs pour y faire pousser des légumes, c’est trop exigeant au niveau physique avec mes difficultés à marcher. Lors de mon long séjour à l’hôpital pendant 11 mois dans une chambre au CHUV (ndlr. grand hôpital suisse, à Lausanne), je me suis tourné vers le graphisme et l’informatique, à ce moment j’ai créé mon premier site Internet. Actuellement je mélange mes deux passions, jardinage et le monde des médias. En 2017 j’ai commencé à faire des vidéos, car je trouve que c’est le bon format. Pour le jardinage l’image est vraiment super, cela vaut 1000 mots comme on dit.

Tu écris ou t’as écrit dans différents journaux en Suisse romande (partie francophone de la Suisse) comme Migros Magazine ou maintenant Terre & Nature, j’ai l’impression que la rubrique du jardinage est très lue, les gens te reconnaissent dans la rue avec ton style d’habillement bien particulier (des bretelles, voir photo ci-dessus), d’ailleurs tu vas faire tes courses avec des bretelles ?
Quand j’écrivais dans Migros Magazine, journal imprimé le plus lu de Suisse romande, les gens me reconnaissaient à Lausanne et me posaient des questions sur le jardinage, déjà à la première édition du journal. Maintenant ça s’est un peu calmé comme je n’écris plus pour ce journal mais un titre plus ciblé qu’est Terre & Nature, on me reconnaît toutefois toujours dans les marchés comme à Lausanne.

T’as un nombre très élevé de followers sur Instagram (plus de 14’000 à la fin mai 2020) pour une région comme la Suisse romande c’est beaucoup, comment t’expliques un tel succès ? La grande passion des Suisses ou Français est le jardinage, comme les Anglais ?
Tout d’abord il faut dire qu’une bonne partie des followers Instagram ne proviennent pas de Suisse mais à 80% de France et d’autres pays du monde francophone comme l’Algérie.  
Premièrement j’explique ce succès par le fait que j’apporte de la valeur ajoutée en répondant aux questions que se posent les gens sur le jardinage, presque tous les jours je publie une nouvelle photo sur Instagram et mets des informations utiles, je réponds à toutes les questions qu’on me pose sur le jardinage, vraiment toutes. Je pense que cela est très important d’avoir cette régularité.  
Deuxièmement je pense que le jardinage est une vraie prise de conscience dans la société, depuis notamment les scandales de la vache folle.

Peux-tu nous expliquer ce que signifie « locavore », un concept qui te tient à coeur ? Te sens-tu un peu comme un missionnaire de la cause ?
Locavore est la contraction de local et –vore (manger comme carnivore, herbivore), donc le fait de manger ou boire local. Parfois défini comme consommer des aliments produits dans un rayon de 150 km au maximum. A titre personnel je consomme des aliments provenant presque exclusivement de Suisse romande et très souvent dans un rayon de moins de 150 km, comme j’habite la région de Lausanne des produits provenant du canton de Vaud. Il va de soi que je consomme par conséquent des produits de saison. Le « locavorisme » augmente le niveau de vie des paysans, comme ici suisses, pollue moins suite à moins de transport. Mais je ne me sens pas avoir une mission. Je conseille aux gens qui veulent toutefois acheter des produits non locaux de se tourner vers des labels de qualité (ex. Max Havelaar). Un autre bon argument de consommer local est qu’en Suisse on finance les paysans par un impôt – le payement direct – pour qu’il puisse vivre. Si on consomme plus local, les paysans auront moins besoin d’être soutenu et par conséquent nous citoyens allons payer moins d’impôts.

Utilises-tu des plantes médicinales ou aromatiques pour te soigner ?
J’utilise plutôt des plantes médicinales ou aromatiques en cuisine, parfois en tisane comme de l’ortie séchée mais j’apprécie surtout les aromatiques dans des plats pour leur donner du goût sans utiliser trop de sel.

Est-ce qu’il a une plante aromatique que t’apprécies particulièrement ?
Je suis un grand fan du romarin, je l’utilise en brochette avec des viandes, pour farcir un poulets avec du citron ou avec des pommes de terre nouvelles quand je les fais simplement sauté à la poêle avec un peu de beurre. C’est mon coup de cœur, presque avant le persil.
Remarque : suivez Tom le Jardinier sur Instagram et découvrez ses recettes naturelles

Sur Creapharma.ch, le sureau est une plante qui suscite un certain intérêt. Justement sur ton compte Instagram, t’as publié une photo sur cet arbuste et tu conseilles d’en planter dans son jardin, est-ce qu’il prend beaucoup de place, faut-il le mettre à l’ombre (derrière un mur) ou plutôt au soleil ?
Le sureau ne pousse pas bien en pot, car il devient trop grand, l’arbuste mesure jusqu’à 5 m de haut. Il faut le planter en plein soleil à mi-ombre si possible. Mais en fait c’est une plante indigène (ndlr. une plante qui a toujours ou presque prospéré dans une région) en Suisse, les oiseaux s’en occupent si on veut. Ils vont manger les fruits ou baies de sureau, puis avec leurs excréments ils vont répandre des graines de sureau un peu partout. Le sureau est un arbuste important pour la biodiversité, comme le noisetier. Cela va attirer les insectes ou les oiseaux. A la différence des haies de thuyas ou de laurelle qui sont un désastre écologique, aussi si un thuya est malade alors tout le quartier aura peut-être des thuyas malades. J’aime bien aussi l’odeur du sureau.

As-tu une recette à base de plante, peut-être médicinale, à nous proposer pour cet été ?
Justement avec les baies de sureau j’en fais surtout de la gelée pour le petit déjeuner le matin, Sinon j’aime beaucoup le sirop de fleurs sureau. Voici la recette :
Pour env. 1,5 litre de sirop de fleurs de sureau
– 8-12 ombelles de sureau
– 1 litre d’eau bouillantes
– 1 kilo de sucre
– Un peu de jus de citron

Sureau (Sureau noir)

Bien secouer les inflorescences (ne pas les laver, elles perdraient toute leur saveur), les placer dans un grand saladier, et verser l’eau bouillante par-dessus. Ajouter le sucre et le jus de citron. Il faut vraiment bien remuer jusqu’à dissolution complète.

Couvrir d’un linge propre pour qu’il ne tombe pas de poussière dedans ou pire des insectes attirés par le sucre et laisser reposer env. 2 jours à température ambiante ou 4-5 jours au réfrigérateur. Remuer de temps à autre.

Filtrer à l’aide d’une passoire fine, porter à ébullition et verser le liquide encore bouillant dans des bouteilles propres et préchauffées. Pour stériliser les bouteilles, les remplir d’eau bouillante, laisser reposer un instant puis verser l’eau. Remplir immédiatement de sirop.

Placé au frais et à l’abri de la lumière, le sirop se conserve 10-12 mois (non ouvert).

Parle-nous un peu du basilic, t’as fait je crois plusieurs vidéos sur la plante. Chez moi, j’ai remarqué qu’il ne vieillit pas très bien, après quelques mois le goût des feuilles est moins bon. Que conseilles-tu ? Et il y a tellement de variétés (pourpre, grande feuille), laquelle préfères-tu par exemple en cuisine ? Et comment le planter ?
Le basilic (le classique si on peut dire, soit le Basilic Genovese) est une plante difficile à cultiver, elle va mourir pour un oui ou pour un non. Elle n’aime pas trop le chaud, pas trop le froid, un peu d’eau mais pas trop, sensible au vent, en résumé une vraie diva. J’aimerais aussi rappeler que le basilic est une plante annuelle, il faut donc la ressemer ou la replanter au moins une fois par année. Moi je le fait 2 à 3 fois par an, pour avoir le meilleur goût au niveau des feuilles. Je n’hésite pas à le tailler. Il faut récolter régulièrement du basilic, même si on ne le consomme pas et du coup le conserver pour l’hiver. De plus, je conseille de récolter les nouvelles feuilles, pas les grandes feuilles qui sont plus vieilles. Car les nouvelles feuilles sont plus riches en huile essentielle et autres principes actifs, et elles sont moins amères.
Par rapport aux variétés de basilic, donc en plus du Basilic Genovese, je conseille le basilic aux grandes feuilles ou à feuilles d’éléphants (très grandes feuilles) pour faire un pesto à la Genovese, le basilic à petite feuille a plus ou moins le même goût que le basilic Genovese mais il est un peu plus résistant, celui à feuille pourpre est bien plus résistant au potager. Puis encore on peut se laisser tenter par le basilic citron, le basilic cannelle, etc. Vive la biodiversité aussi en termes de basilic.
Le basilic se multiplie bien par semis. Quand on en achète en jardinerie les pots sont souvent trop remplis. Il faut donc casser les mottes. Les semis fonctionnent bien. Il est toutefois assez sensible à la pourriture. Mon astuce consiste à ajouter un petit peu de charbon piler dans le terreau lors du semis. Concernant la bouture de basilic, je ne l’ai jamais faite mais je ne pense pas que cela soit une bonne idée (ndlr. c’est possible, lire notre article sur le basilic).

Finalement, quels sont tes projets, peut-être un jour un livre de jardinage ?
Depuis que j’ai passé sur France 2 il y a quelques semaines dans une émission (« Je t’aime, etc…») j’ai reçu environ 1000 e-mails en quelques heures puis j’ai reçu des propositions pour un livre de quelques maisons d’édition. Je travaille donc désormais sur la réalisation de ce livre. Je vais y mettre tout mon cœur et peut être même le faire entièrement seul du texte à la mise en page et même les photos.

Dans l’attente de son livre, n’hésitez pas à suivre Tom le Jardinier sur Instagram, YouTube et son site Internet.   

Article mis à jour le 31 mai 2020. Interview réalisée par téléphone (Skype) par Xavier Gruffat avec Tom le Jardinier (Tom Monnat) le 27 mai 2020. L’interview a été réalisée avec le tutoiement pour en simplifier la lecture et a été éditée et simplifiée. Crédits photos : Tom le Jardinier, Creapharma.ch (Pharmanetis Sàrl)


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Informations sur la rédaction de cet article et la date de la dernière modification: 31.05.2020
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