Médicaments pour maigrir comme le sémaglutide : interview avec la spécialiste de l’obésité Dre Dominique Durrer

VEVEY Les agonistes des récepteurs du GLP-1 comme le sémaglutide (Ozempic®, Rybelsus®, Wegovy® – ce dernier est indiqué spécialement contre l’obésité) et le liraglutide (Victoza®, Saxenda® – ce dernier est indiqué spécialement contre l’obésité) ont permis de grandes avancées dans le traitement du surpoids et surtout de l’obésité. La perte de poids avec cette famille de médicaments peut aller jusqu’à 20%. Les agonistes du GLP-1, à l’origine développés pour traiter le diabète et toujours indiqués pour cette maladie, imitent notamment le sentiment naturel de satiété et agissent comme coupe-faim. Avec l’arrivée de ces médicaments, des anciennes molécules comme l’orlistat (Xenical® et génériques) deviennent de moins en moins utilisées, pour ne pas dire désuètes.

Creapharma.ch a pu interroger la Dre Dominique Durrer, grande spécialiste suisse de l’obésité. Elle est notamment spécialisée en nutrition, obésité et troubles du comportement alimentaire. La Dre Durrer est aussi la présidente de l’Association de patients Eurobesitas. L’interview a été éditée et simplifiée pour une meilleure compréhension.

Dre Dominique Durrer

Creapharma.ch – Quelle est votre expérience pratique, clinique, avec le sémaglutide et le liraglutide ?
Dre Dominique Durrer – Comme le liraglutide, avec le nom de marque Saxenda®, a été mis sur le marché en 2016 pour traiter le surpoids et l’obésité, j’ai plus d’expérience avec cette molécule qu’avec le sémaglutide. Il faut savoir que le Wegovy®, même si enregistré en Suisse en 2022, n’est toujours pas disponible en pharmacie. Je m’attends, et mes collègues endocrinologues, à pouvoir le prescrire dès mars 2023. Pour revenir au liraglutide, j’ai une expérience très positive avec ce médicament, la grande majorité de mes patients y réagit très bien, mais il est indispensable qu’ils soient suivi par une équipe multidisciplinaire, un(e) nutritionniste ou diététicien(ne), un spécialiste de l’activité physique ou physiothérapeute.

La perte de poids est rapide avec le liraglutide ou le sémaglutide (pour les diabétiques)…
Oui, la très grande partie de mes patients perd du poids déjà quelques semaines après le début des injections, surtout quand la prise en charge est multidisciplinaire avec notamment une modification du style de vie (alimentation, pratique d’exercice, etc.). Cela est d’ailleurs exigé par l’assurance maladie et c’est une condition sine qua non pour la prise en charge du médicament.

En Suisse, qui pourra prescrire le Wegovy® ?
La prescription de ce médicament ne pourra pas se faire par tous les médecins mais par des spécialistes de l’obésité ou des endocrinologues.

Parlons un peu des effets secondaires du liraglutide et du sémaglutide. Un article de la NZZ (journal suisse de référence) du 25 juin 2022 s’est vu rassurant en affirmant qu’aucun effet secondaire grave (sauf exception ou contre-indication) n’a été signalé jusqu’à présent avec ces médicaments, êtes-vous d’accord ?
Oui, je partage ce point de vue. On a un grand recul avec le traitement avec le liraglutide (Victoza®), mis sur le marché en Suisse contre le diabète en 2009 déjà, soit il y a bientôt 15 ans. Sans compter les études cliniques réalisées avant sa mise sur le marché en 2009 (en Suisse). Je n’ai pas noté d’effets secondaires graves chez mes patients. Bien sûr, il peut y avoir des nausées ou de rares vomissements au début du traitement. Il y a un risque rare de souffrir de pancréatite. De plus, des études sur des rats ont montré d’éventuels risques de cancer de la thyroïde mais selon moi il n’y a pas eu d’études ayant montré ce risque chez l’être humain.

Ce qui est assez extraordinaire, de nouvelles molécules (médicaments) encore plus efficaces devraient arriver sur le marché ces prochains mois ou années aux Etats-Unis et en Europe ?
Oui, certaines études cliniques de nouvelles molécules contre l’obésité semblent indiquer des effets sur la réduction de poids encore plus significatifs que le liraglutide ou le sémaglutide, de l’ordre peut-être de 25%, c’est-à-dire presque autant que la chirurgie bariatrique.

On sait qu’à cause des médias sociaux, en particulier Instagram et surtout TikTok, il y a de plus en plus de personnes qui mettent des photos de type « avant et après » avec l’Ozempic®, que pensez-vous ?
Il faut vraiment communiquer à la population qu’il ne faut pas commander les médicaments sur Internet et ne pas faire de l’automédication (dans les pays où c’est possible). Le médicament doit absolument être prescrit par un médecin. Un suivi, si possible multidisciplinaire (ex. médecin, nutritionniste, spécialiste de l’activité physique), est fortement recommandé.

Le 11 janvier 2023. Interview réalisée par téléphone entre Xavier Gruffat (pharmacien, pour Creapharma.ch) et la Dre Dominique Durrer début décembre 2022. Interview réalisée en partenariat avec le site Pharmapro.ch. Crédits photos : Adobe Stock, divulgation (Dre Dominique Durrer).

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Informations sur la rédaction de cet article et la date de la dernière modification: 24.01.2024
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