MANCHESTER – Les personnes atteintes du trouble de la personnalité limite (TPL), appelé aussi trouble de la personnalité borderline (TPB), seraient 13 fois plus susceptibles d’avoir vécu des traumatismes infantiles que les personnes qui n’ont pas de problèmes de santé mentale. C’est ce que révèle une étude de l’Université de Manchester, réalisée en collaboration avec le Greater Manchester Mental Health NHS Foundation Trust, publiée dans le journal Acta Psychiatrica Scandinavica le 18 novembre 2019.
Des données issues de 42 études internationales
L’analyse des données de 42 études internationales portant sur plus de 5’000 personnes a révélé que 71,1 % des personnes ayant reçu un diagnostic de maladie grave ont déclaré avoir vécu au moins un traumatisme durant leur enfance. Dans la dernière d’une série de méta-analyses de l’équipe sur les effets des traumatismes de l’enfance sur la santé mentale des adultes, elle montre que ces traumatismes sont beaucoup plus susceptibles d’être associés au TPL que les troubles de l’humeur, la psychose et autres troubles de la personnalité.
Impact significatif de la violence psychologique et de la négligence
Les expériences pénibles les plus fréquentes que les personnes atteintes de TPL mentionnent avoir vécues étaient la négligence physique (48,9 %), suivie par la violence psychologique (42,5 %), la violence physique (36,4 %), la violence sexuelle (32,1 %) et la négligence psychologique (25,3 %).
Le TPL est souvent un problème de santé mentale débilitant qui rend difficile pour une personne de contrôler ses émotions et ses impulsions. Ce trouble, souvent lié à l’automutilation et à la toxicomanie, est difficile à traiter et entraîne des coûts importants pour les personnes atteintes et la société dans son ensemble.
Certaines des caractéristiques de cette affection – comme l’expérience d’émotions extrêmes et accablantes par rapport à ce qui pourrait être perçu par les autres comme un problème mineur – sont courantes, mais deviennent chroniques et exagérées après un traumatisme de l’enfance.
Un lien fort entre les traumatismes de l’enfance et le TPL
Selon le Dr Filippo Varese, de l’Université de Manchester : « Pendant l’enfance et l’adolescence, notre cerveau continue de se développer considérablement et nous affinons également nos stratégies pour faire face aux défis de la vie quotidienne et aux sentiments négatifs qui en découlent. Chez certaines personnes qui ont vécu un stress chronique et accablant dans leur enfance, il est probable que ces réactions ne se développent pas de la même façon. Les gens peuvent devenir plus sensibles au stress ” normal “. Ils sont parfois incapables de composer avec des pensées et des sentiments négatifs intenses, et ils peuvent recourir à des mesures dangereuses ou inutiles pour se sentir mieux, comme la prise de drogues ou l’automutilation. Cela peut entraîner diverses difficultés de santé mentale, y compris les problèmes couramment observés chez les personnes qui reçoivent un diagnostic de TPL. »
Les chercheurs ont ainsi observé un lien fort entre les traumatismes de l’enfance et le TPL, ce qui est particulièrement important quand il s’agit de violence psychologique et de négligence.
À noter que le terme TPL a été utilisé à l’origine pour désigner des problèmes de santé mentale qui n’étaient ni une psychose, ni un trouble anxieux ou dépressif, mais quelque chose qui se trouvait au milieu. Un autre terme utilisé dans les temps modernes est celui de « trouble de la personnalité émotionnellement instable », qui reflète peut-être une image plus claire du genre de problèmes typiquement décrits par ces personnes.
Des recherches plus approfondies seront nécessaires pour explorer les facteurs complexes susceptibles d’être impliqués dans l’apparition du trouble de la personnalité limite, tels que la biologie, les expériences plus tard dans la vie, et les processus psychologiques.
Le 21 novembre 2019. Par la rédaction de Creapharma.ch (supervision scientifique par Xavier Gruffat, pharmacien). Sources : Communiqué de presse de l’étude (en anglais). Référence : Acta Psychiatrica Scandinavica. Crédit photos : Adobe Stock