LONDRES – A l’occasion du mois sans alcool – Dry January ou janvier sec en français – mode venue du Royaume-Uni avec 4 millions d’adeptes, Creapharma.ch vous présente quelques informations utiles. L’alcool est une boisson très consommée en Occident, parfois trop, vu que seulement en France l’alcoolisme ferait de 40’000 à 49’000 morts par année selon les sources. L’alcool tue par maladies (ex. hépatite) ou accidents 3,3 millions de personnes par an dans le monde, selon l’OMS. Mais la jeune génération semble l’avoir compris, car la consommation d’alcool diminue dans plusieurs pays industrialisés comme l’Europe et la Chine surtout chez les jeunes, selon une édition du magazine The Economist datant de décembre 2019. Depuis le début du 21ème siècle la consommation d’alcool en France a diminué de 14% et même de 43% en Russie. En l’an 2000, 47% de la population mondiale buvait de l’alcool (au moins une boisson alcoolisée par année) contre 43% en 2016, selon l’OMS. Une raison derrière cette chute de la consommation d’alcool proviendrait des adolescents ou jeunes qui se socialisent davantage online par les médias sociaux et moins dans les bars ou restaurants qu’à l’époque. La conséquence est que les adolescents commencent à boire de l’alcool plus tard qu’à l’époque. Bref, l’alcool est tout simplement moins cool qu’avant. The Economist mentionne aussi qu’en Allemagne et aux Pays-Bas, les bières sans alcool représentent désormais 10% du marché. Distinguer le vrai du faux en termes d’impact pour la santé peut s’avérer très utile, car beaucoup de mythes et fausses informations circulent.
1. Mieux vaut ne jamais boire d’alcool
Certains groupes d’influence (lobby), notamment ceux du vin, aiment véhiculer des informations fausses ou non fondées scientifiquement, l’une d’elles consiste à faire croire qu’il est bénéfique de boire un verre de vin par jour. Le resveratrol, une molécule qu’on retrouve dans le vin et mis en avant notamment par des groupes d’influence, n’a pas montré scientifiquement un véritable impact sur la santé en particulier cardiovasculaire (ex. réduction du nombre d’infarctus ou d’AVC). Des études récentes ont démontré qu’il est toujours mieux pour la santé de ne pas boire d’alcool. Boire seulement quelques verres d’alcool par semaine augmente le risque de mortalité prématurée ainsi que le risque de développer un cancer (l’alcool est cancérigène même à faible dose), en comparaison aux personnes qui ne boivent jamais d’alcool. Bien sûr, il est préférable de boire un verre de vin par jour plutôt que plusieurs. Mais ne commencez pas à boire de l’alcool pour un éventuel effet préventif sur la santé.
En effet, même une faible consommation d’alcool présente des risques pour la santé, selon une étude publiée le 23 août 2018 dans le journal scientifique The Lancet (DOI : 10.1016/S0140-6736(18)31310-2) sur la consommation mondiale de boissons alcoolisées et le lien avec 23 maladies. Cette vaste étude a été réalisée par des chercheurs de l’Université de Washington à Seattle et a pris en compte 694 études sur la consommation d’alcool et 592 études sur les risques sanitaires liés à sa consommation. Les données couvrent la population âgée de 15 à 95 ans dans 195 pays.
2. Les femmes sont plus vite ivres – grossesse
Comme les femmes ont en moyenne plus de graisse corporelle que les hommes et que la graisse contient peu d’eau, l’alcool se dilue moins dans les liquides de la femme que de l’homme. Par conséquent, la concentration d’alcool augmente plus rapidement chez la femme que l’homme. Le volume total du sang est aussi en général plus bas chez la femme (4 l) que chez l’homme (5 l). De plus, les femmes ont un niveau plus faible de l’enzyme dehydrogénase, responsable de la dégradation (métabolisme) de l’alcool. Ainsi, la concentration d’alcool dans le sang des femmes est plus élevé que chez l’homme. Pour toutes ces raisons, les femmes devraient boire une quantité d’alcool inférieure aux hommes.
Une femme enceinte ne devrait aussi pas boire d’alcool, même en petite quantité. Car l’alcool peut mener notamment à des maladies et malformations de l’enfant à naître.
3. Alcoolémie – Mesure de l’alcool
On peut mesurer l’alcoolémie, c’est-à-dire le taux d’alcool dans le sang. Tout simplement, plus on ingère d’alcool et plus l’alcoolémie augmente. En général, à moins de 0,5 pour mille les effets sur l’organisme sont plutôt légers mais peuvent néanmoins diminuer les capacités visuelles, ce qui peut compliquer par exemple la conduite automobile. De 1,0 à 1,2 pour mille, il s’agit d’ivresse. De 3,0 à 5,0 pour mille, la personne peut se retrouver dans le coma.
Alcoolisme
En plus de l’alcoolémie, on peut quantifier le nombre de boissons alcooliques consommées sur une période de temps afin de connaître l’alcoolodépendance d’une personne. Un homme est considéré comme alcoolique en cas de consommation quotidienne de plus de 2 volumes d’alcool. Une femme est considérée comme alcoolique en cas de consommation quotidienne de plus d’1 volume d’alcool. On trouve par exemple un volume d’alcool dans une bière d’environ 300 ml, un verre de vin rouge d’environ 120 ml ou un verre d’alcool fort comme la vodka.
4. Médicaments pour lutter contre l’alcoolisme, peu efficaces
Certains médicaments sont utilisés contre l’alcoolisme comme le natrexone, le nalméfène, l’acamprosate, le baclofène ou le topiramate. Néanmoins, une méta-analyse ou revue d’études publiée le 20 septembre 2017 dans le journal scientifique Addiction (DOI : 10.1111/add.13974) n’a trouvé aucune preuve fiable de l’efficacité de ces médicaments. Au mieux, certains de ces médicaments montrent une efficacité légère ou moyenne pour lutter contre l’alcoolisme, mais ces résultats favorables proviennent d’études avec un risque élevé de biais (ex. erreurs dans la méthodologie ou analyse des résultats). Cette méta-analyse a pris en compte 32 études en double aveugle randomisée publiées entre 1994 et 2015 incluant 6’036 patients. L’auteur de cette revue d’étude, le Dr Palpacuer de l’Inserm à Rennes en France, n’estime pas dans un communiqué de l’étude que ces traitements sont inefficaces mais il note qu’on ne sait pas encore si ces médicaments sont efficaces. Autrement dit, il manque des études sérieuses concernant l’efficacité de ces médicaments pour lutter contre l’alcoolisme.
5. Vin ou bière ? Influence sur la gueule de bois ?
Est-ce préférable de boire du vin ou de la bière ? Ce qui compte n’est pas le type de boisson alcoolisée bue mais la quantité totale d’éthanol consommé. Autrement dit, une personne peut ingérer moins d’alcool en buvant un petit verre de vodka qu’une personne buvant 10 bières. Une étude publiée en février 2019 dans la revue American Journal of Clinical Nutrition (DOI : 10.1093/ajcn/nqy309) a montré que l’ordre dans lequel une personne consomme des boisons alcooliques et notamment la bière et le vin n’avait pas d’influence sur la fameuse gueule de bois (hangover en anglais) du lendemain. Dans certaines cultures, il est recommandé de boire de la bière avant le vin pour éviter la gueule de bois le lendemain. Cette étude de 2019 a montré qu’il s’agissait d’un mythe et pas d’une vérité scientifiquement prouvée.
Lire aussi : dossier complet sur l’alcoolisme – L’alcool consommé avec modération, bon pour le cœur ? Cela dépend – La bière sans alcool, la nouvelle (et bonne) mode
Article mis à jour le 11 janvier 2020. Par Xavier Gruffat (pharmacien). Références et sources : American Journal of Clinical Nutrition (DOI : 10.1093/ajcn/nqy309), Addiction (DOI : 10.1111/add.13974), The Economist (édition des prévisions 2020), Journal de France 2 du 4 janvier 2020, Magazine Superinteressante.