Inhibiteurs de la pompe à protons (IPP)
Les inhibiteurs de la pompe à protons (IPP ou IPPs au pluriel) sont des médicaments très utilisés dans le monde, ils sont notamment indiqués en cas de brûlures d’estomac, de reflux gastro-oesophagien (RGO) ou d’hernie hiatale lors de sécrétion acide ou remontées acide dans la bouche. Les IPP peuvent inhiber environ deux tiers de la production d’acidité gastrique. Ils permettent aussi au tissu endommagé de l’oesophage de se soigner. Contre le RGO, les IPP sont les médicaments les plus efficaces1. Une utilisation à long terme des IPP a été associée à une petite augmentation du risque de graves complications (ex. troubles rénaux, ostéoporose, cancer de l’estomac – lire davantage ci-dessous).
En anglais, les IPP portent le nom de : proton pump inhibitors (PPI ou P.P.I.).
Epidémiologie
– On estime qu’environ 10% de la population prend des IPP, selon un communiqué publiée en 2017 de l’école de médecine de l’Université de Californie à San Diego (Etats-Unis).
– Aux Etats-Unis, selon des estimations relevées par le magazine sur la santé grand public Prevention en mars 2018, environ 50 millions d’Américains prennent des inhibiteurs de la pompe à proton. Aux Etats-Unis les principaux IPP vendus sont : Nexium® (à base d’ésoméprazole), Prevacid® (lansoprazole), Prilosec® (oméprazole) et Protonix® (pantoprazole).
Effets sur l’estomac
Les IPP agissent sur la pompe à proton des cellules pariétales de l’estomac. Comme l’estomac produit de l’acide gastrique pour tuer les microbes ingérés, la prise d’IPP pour supprimer cette sécrétion acide peut changer la composition du microbiote intestinal (anciennement appelé flore intestinale). Une étude publiée le 10 octobre 2017 dans le journal scientifique Nature Communications a notamment montré qu’en l’absence d’acidité dans l’estomac, les bactéries Enterococcus se déplacent dans l’intestin puis dans le foie, où ces bactéries accroissent l’inflammation et aggravent les maladies hépatiques chroniques (lire aussi ci-dessous sous Risques d’une utilisation à long terme).
Rapidité d’action
Les IPP ne soulagent pas rapidement les symptômes, à la différence de deux autres classes de médicaments contre les brûlures d’estomac, soit les antiacides et les bloqueurs H2 (comme la famotidine ou cimétidine). Les IPP mettent en général quelques jours avant de commencer à faire effet.
IPP – liste par molécule
– Oméprazole (Mopral®, Antramups®, Prilosec® – nom de marque aux Etats-Unis, Antra® et génériques)
– Esoméprazole (Nexium® et génériques)
– Pantoprazole (Pantozol® et génériques)
– Lansoprazole (Lanzor®, Prevacid® – nom de marque aux Etats-Unis et génériques)
– Dexlansoprazole (Dexilant® – nom de marque aux Etats-Unis)
– Rabeprazole (Pariet® et génériques, Aciphex® – nom de marque aux Etats-Unis)
Les IPP sont la plupart prescrits sur ordonnance médicale. Toutefois, dans certains pays et notamment en Suisse l’oméprazole, au dosage de 10 mg, est depuis avril 2010 disponible sur le marché en vente libre. Aux Etats-Unis, en 2020 les molécules suivantes étaient disponibles sans ordonnance (OTC) : oméprazole, lansoprazole et esoméprazole.
Moment de la prise :
Le moment de prise des IPP permettant d’obtenir une inhibition maximale des pompes à protons est le matin, 30 minutes avant le repas afin que la concentration sérique de l’IPP soit maximale au moment où les pompes sont actives. Il est important de manger après la prise d’un IPP2.
Classification :
Les inhibiteurs de la pompe à protons (IPP) appartiennent à la catégorie A02BC, selon le système ATC approuvé par l’OMS. La classe A signifie “Tractus digestif et métabolisme”. A02 comprend les “médicaments des troubles liés à l’acidité”. Le Système de classification anatomique, thérapeutique et chimique (en anglais : Anatomical Therapeutic Chemical (ATC) Classification System) est utilisé pour classer les médicaments.
Risques d’une utilisation à long terme, principaux effets secondaires
Selon la littérature, l’utilisation des IPP à long terme (>1 an) a été associée à divers problèmes de sécurité, par exemple un risque augmenté de fractures et/ou d’ostéoporose, un allongement de l’intervalle QT et d’autres maladies cardiovasculaires comme l’infarctus du myocarde et l’AVC, un risque augmenté d’insuffisance rénale comme une néphrite interstitielle aiguë, une augmentation du risque d’infection par la bactérie problématique Clostridium difficile, une colite infectieuse, une démence (ex. Alzheimer), une augmentation de certaines maladies hépatiques, un cancer de l’estomac, une pneumonie ou une carence en vitamine B12. La durée de l’utilisation des IPP et la prise de ces médicaments chez des patients sans indication correct ont été également associées à une augmentation de la mortalité toutes causes confondues, selon le site suisse de référence sur les médicaments Pharmavista.net.
Les personnes âgées de plus de 50 ans ont aussi plus de risque de souffrir de certains effets secondaires comme les fractures, la colite infectieuse, le cancer de l’estomac, les infarctus du myocarde et l’AVC, les maladies rénales, les démences (ex. Alzheimer) ou même la mort.
A court terme, les effets secondaires des IPP peuvent être : douleurs abdominales, diarrhée, constipation, mal de tête. En général, les IPP sont bien tolérés3.
Génétique et IPP (ex. oméprazole)
L’oméprazole n’est pas toujours correctement éliminé chez certaines personnes. En effet, jusqu’à 15% des individus prenant ce médicament métabolisent (éliminent) l’oméprazole très lentement. La conséquence est une concentration plus élevée dans le sang avec un risque augmenté d’effets secondaires.
Effet rebond
Après l’arrêt de la prise d’IPP comme par exemple après plusieurs mois ou années de traitement, un effet ou phénomène rebond (en anglais : rebound phenomenon) peut survenir. Cela signifie qu’après l’interruption des médicaments, une sécrétion d’acide, une indigestion ou des brûlures d’estomac peuvent réapparaître. Cet effet rebond peut durer pendant des mois jusqu’à ce que le niveau d’acidité gastrique se stabilise.
Interactions
Les IPP peuvent mener à des interactions notamment avec la vitamine B12 et le magnésium. Les IPP peuvent mener à un manque de magnésium (hypomagnésémie).
Suite à ces interactions il peut s’en suivre des effets secondaires comme de la fatigue, de l’anémie, des crampes, de l’hypertension ou des changements de l’humeur.
Aspect économique
Le marché des IPP est estimé à 11 milliards de dollars (USD) par année aux Etats-Unis, selon une étude publiée en 2012.
News sur les IPP :
– Les médicaments courants contre le reflux acide sont associés à un risque accru d’insuffisance rénale
– Des médicaments contre le reflux comme l’oméprazole favorisent les maladies chroniques du foie
Sources & Références :
Pharmavista.ch (site suisse de référence sur les médicaments), Nature Communications, Lien pour paragraphe sur Aspect économique : https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3388523/, Prevention (magazine américain sur la santé), Mayo Clinic, The New York Times, Harvard Medical School.
Rédaction :
Xavier Gruffat (pharmacien)
Dernière mise à jour de la page :
29.01.2024
Références scientifiques et bibliographie :
- Livre en anglais : Mayo Clinic on Digestive Health, How to prevent and treat common stomach and gut problems, 4th edition, Sahil Khanna, M.B.B.B.S, 2020, Mayo Clinic
- CBIP, Folia Pharmacotherapeutica, décembre 2023, Chaque médicament au bon moment ! Partie 1 : (le matin) à jeun
Revue Médicale Suisse, 814/2023/p340 - Livre en anglais : Mayo Clinic on Digestive Health, How to prevent and treat common stomach and gut problems, 4th edition, Sahil Khanna, M.B.B.B.S, 2020, Mayo Clinic